La cité, la nuit entre deux mondes
C'est ma city, mon immeuble est complètement en haut, à droite. Au loin, en bas, ce qu'on voit, c'est la Grande Bleue et les Iles d'Or (de mon balcon, je vois même le fort de Brégançon et ça m'énerve...)
La nuit dernière, après avoir comaté devant la téloche, échangé les désormais traditionnels textos avec le charmant, je vais me coucher. Le mistral souffle depuis quelques jours, cette nuit, il est spécialement déchainé. Mais ce bruit de frottement.. C'est trop fort, ce n'est pas le bruit des branches de "mon " arbre, le chêne-liège juste en face de la fenêtre de ma chambre. P.... d'Adèle, comme on dit ici quand on est pressé. Je saute du lit, chope au passage un châle, une clope, ma petite lampe, je fonce au balcon de la cuisine.
Ils sont là, je scrute l'obscurité, 3, non 4 sangliers, 3 gros et un plus petit. J'allume ma lampe, je balaye en face de moi, et tout d'un coup... Je sursaute, une cavalcade là tout près. Un des gros est là, à deux mètres de moi à peine. Pas impressionné par la lumière. Il ne bouge plus, je retiens mon souffle. Je ne sais pas combien de temps on reste là, tous les deux, à se regarder. Moi sur le balcon de ma maison en béton, lui qui a peut-être galopé sur des kilomètres avec sa bande parce que les glands du quartier sont plus abondants, ou plus sucrés. L'impression d'être téléportée, d'avoir un contact avec un être d'une autre planète. Est-ce que ça pense, un sanglier, est-ce qu'il voit que je ne suis pas une ennemie. Je me lance bonsoir.., il ne bronche pas.
Et puis, les autres commencent à remonter vers le haut de la colline en grognant, il fait demi-tour, disparait sous les branches.
Le chat vient se frotter contre moi, un peu inquiet quand même. Des fois que je ne lui préfère une de ces grosses bêtes. Je vais me recoucher, je m'endors en rêvant à des forêts inexplorées, des nuits peuplées de sangliers, de petits ducs, même de lutins.